separation line
Imprimer cette page | format PDA

Archives 1996-1997

Titre des projets et extraits

  • La femme battue (extrait): Aude Charmillot, Tatiana Giraud, Alexandra Myers
  • L'enfant autiste: Helia Ebadi, Sarah Spierer, Florence Thorimbert
  • VIH/SIDA (extrait):Nicolas Gerber, Lukas Kreienbühl, Stéphane Reverdin
  • Rapport sur le tabagisme: Christophe Hentsch, Olivier Julen, Frédéric Lador
  • Santé reproductive des adolescents (extrait):Laure Brulhart, Hélène Chappuis, Philippe Vostrel
  • Santé des requérants d'asile (extrait):Laurence Doelker, Alexandra Johnson, Yann Parel, Vincent Righetti
  • In vino veritas - Prise en charge des problèmes liés à l'alcool (extrait):Valérie Kloeti, Yves Ferran, Laurent Robert
  • Vivre une fin de vie de qualité: rôle des soins palliatifs: Albane Mastrogiacomo, Nils Siegenthaler, Stéphane Emonet

La femme battue

Le débat siège sur plusieurs plans, à savoir :
- le domaine judiciaire : doit-on ou non modifier la loi pénale ?
- l'aide à apporter aux hommes auteurs de violence et dans quelles conditions est-ce que cette aide doit être fournie ?
- et enfin sur le plan médico-social : est-ce la solution de médicaliser les problèmes sociaux ?
La loi actuelle stipule que c'est à la femme-victime de porter plainte contre son agresseur pour mettre en marche la machine judiciaire. Cette démarche rend la femme responsable de son "sort" et lui demande beaucoup de courage. Il ne faut pas oublier que porter plainte contre son agresseur signifie pour bon nombre d'entre elles engager une procédure contre le père de leurs enfants, la personne dont elles sont dépendantes financièrement, l'homme pour qui elles éprouvent une réelle affection.
Certaines associations telle que Solidarité Femmes se battent pour que les femmes victimes de violence conjugale puissent être "secourues" sans avoir besoin forcément elles-mêmes d'être nommément à l'initiative de la poursuite de leur mari ou concubin. En effet, les coups, les insultes, la méprise de l'autre accumulés pendant des années de violence lui ont fait perdre toute estime d'elle-même, toute confiance et toute capacité de décision.
Une autre revendication d'ordre judiciaire porte sur la place de la violence au sein même du couple. Il faut en effet préciser qu'en Suisse, un acte de violence d'un mari envers sa femme est considéré de la même façon qu'un acte de violence envers un inconnu, à ceci près que l'on a tendance à être beaucoup plus tolérant lorsque des disputes, aussi violentes soient-elles, se produisent dans l'enceinte de la famille. Est-ce par pudeur, est-ce par honte, est-ce par égoïsme, est-ce par indifférence, est-ce par peur que personne n'intervienne lorsqu'une scène d'une dureté extrême se passse juste à côté ? Pour tenter de remédier à cela, des institutions comme le Bureau de l'Egalité se battent pour faire inscrire, comme c'est le cas en France, la violence conjugale comme une violence particulière dans le Code Pénal.
Un autre point débattu concerne les groupes pour hommes violents. La question étant de savoir s'il faut, comme au Canada, obliger les hommes auteurs de violence à suivre une thérapie en échange d'un sursis d'emprisonnement lors du jugement. Au Canada, cette manière de procéder est plutôt un succès, les hommes préférant de loin cette alternative à la prison ferme. Sans oublier que cela est non seulement au bénéfice de l'auteur de violence, mais aussi, parfois, du couple puisqu'elle donne l'opportunité à la personne violente de faire un travail sur elle-même et de résoudre tout ou partie de son problème. A Genève, il existe déjà un groupe de "soutien" pour hommes violents (VIRES) et la piste qui consiste à faire suivre une thérapie aux hommes violents n'est selon certains pas assez explorée. Il faut souligner que l'instrument juridique, à l'heure actuelle, existe et donc permet de délivrer un sursis soumis à certaines règles de conduite, mais que le problème se situe au niveau du suivi. Pour ceci, il faudrait que des organisations telles que VIRES soient "légalisées", c'est-à-dire qu'il y ait une collaboration étroite entre elles et la justice : il serait nécessaire de rendre des comptes sur les personnes en cours de suivi. La "légalisation" impliquerait également que ces organisations travaillent sur mandat.
Quant à savoir si la violence doit être une préoccupation du domaine médical ou au contraire rester au niveau social, le débat est à ce jour irrésolu.

[ Titre des projets 1996-1997 ]

Sida

Les stratégies de prévention restent aujourd'hui principalement basées sur le dogme "information ? connaissances des risques ? gestion des risques ? comportement adapté". Cette théorie a ses limites, comme le montre le travail de recherche effectué en sociologie ces dernières années. Les stratégies de prévention tentent de modifier des comportement en informant sur la manière de réduire la prise de risques. Or, la gestion des risques n'est qu'un des déterminants du comportement. Une analyse attentive de ces déterminants met en évidence l'importance des aspects relationnels et affectifs. La pratique ou non du "safer sex" est fortement influencée par la signification que revêt l'utilisation du préservatif dans le cadre de la relation. Dans ce langage relationnel, on lui associe d'une part des messages positifs (tels le reflet d'une préoccupation pour la santé du partenaire, l'expression d'une approche responsable) et d'autre part des messages plus négatifs (expression d'une certaine méfiance au sujet du statut du partenaire ou introduction d'un doute sur son propre statut, obstacle à la complétion de l'union du couple). L'identification de ces significations donne de nouveaux horizons à la prévention et permet de mieux comprendre pourquoi, malgré une information massive, 40% des suisses de 17 à 35 ans n'utilisent toujours pas de préservatif lors d'un contact avec un partenaire occasionnel. Il reste cependant difficile de dégager de cette nouvelle approche des stratégies concrètes à même de réorienter la conception actuelle de la prévention. Un objectif pourrait être de dénuer l'utilisation du préservatif de significations, d'en faire un comportement préventif accepté comme norme. Reste la question de trouver comment y parvenir. Dans le domaine affectif, il semble peu utile de vouloir imposer des normes. Il est plus efficace de faire évoluer les réactions de façon spontanée, en fournissant par exemple un cadre approprié. A cet égard, des espaces conviviaux tels que le Bus Itinérant Prévention Sida, permettant aux individus de partager leur expérience, semblent susceptibles de faire naturellement progresser tout un chacun.

[ Titre des projets 1996-1997 ]

Santé reproduction des adolescents

Le planning familial remplit bien son rôle d'information, d'aide et de soutien. Toutefois, la plupart des jeunes ne vont au CIFERN qu'en dernier recours. C'est que le centre se présente davantage comme un cabinet médical qu'on fréquenterait au cas où les problèmes liés à la sexualité ou à la relation de couple se poseraient. De ce fait, certains adolescents craignent de se trouver catalogués, étiquetés, avec, somme slogan : "Ma sexualité me pose des problèmes".
Une amélioration pourrait être apportée à cette structure. Il s'agirait de créer un Espace jeunesse, santé et sexualité qui réunirait de manière complémentaire, dans un même lieu, les prestations éducatives et psychosociales existant au CIFERN et au Service Santé Jeunesse. La collaboration étroite de ces deux services paraît primordiale pour l'établissement d'une relation de confiance avec les jeunes et permettre à la prévention d'atteindre son but.
Il s'agirait donc de créer une arcade qui soit un lieu ouvert, attrayant et surtout plus accessible. Les jeunes pourraient venir consulter des professionnels, de manière individuelle, en couple ou en groupe *. La confidentialité serait garantie. Ces consultations proposeraient des modes diversifiés d'information, d'orientation et d'aide. L'arcade serait aussi un lieu d'étude et de recherche, dont le but serait de promouvoir une approche globale de l'adolescent et de "développer conjointement l'information et l'éducation dans une perspective de prévention plus efficace et adaptée à l'âge de la population concernée".

[ Titre des projets 1996-1997 ]

Santé des requérants d'asile

La politique de prise en charge sanitaire des requérants d'asile leur permet mal de s'intégrer au système médico-social existant et ne leur offre pas suffisamment tôt un soutient psychologique adapté.
Le réseau médico-social se trouve confronté à la complexité que requiert la prise en charge des requérants d'asile :
- les requérants ne bénéficient pas de manière systématique de la présence d'un interprète qualifié lors de leurs différents entretiens;
- le temps d'écoute imparti aux requérants, lors de leur arrivée, est quasiment inexistant, ce qui ne permet pas une détection précoce des problèmes psychologiques;
- il n'existe aucune structure de prise en charge psychiatrique adaptée aux requérants d'asile, bien que des associations privées comme Appartenance et Pluriels commencent à se mettre en place.
Cependant, bien que le système à Genève ne soit pas parfait, il n'en reste pas moins un des plus structuré de Suisse quant à la prise en charge médicale des requérants d'asile.
Il apparaît clairement que si nous voulons assurer à tous nos patients étrangers que qualité de soins égale à celle des patients autochtones, il nous faut faire appel à des réseaux d'interprètes/médiateurs spécialement formés, mais aussi nous habituer à travailler avec ces personnes, afin que la relation triangulaire qui s'établit entre le soignant, le patient et l'interprète/médiateur ne soit pas un poids ou un frein à la communication, mais au contraire devienne un outil performant et dynamisant.

[ Titre des projets 1996-1997 ]

Alcool

Les problè mes d'alcool sont dépistés de manière très insuffisante par les médecins. L'utilisation même du simple test de CAGE ne semble pas systématique. Cette attitude médicale face aux problèmes d'alcool s'explique sans doute par deux éléments : d'une part. il existe une relative "peur" des médecins devant la douleur d'une prise en charge sevrée de ce type de patients. D'autre part, un manque assez général de formation spécifique des médecins dans le domaine de l'alcoologie, et plus particulièrement dans le domaine des techniques d'entretien avec des personnes souffrant d'un problème de dépendance.
En ce qui concerne le réseau genevois d'alcoologie, il est dense en comparaison avec d'autres régions de Suisse. Il faut noter une accessibilité et une connaissance du réseau par les différents acteurs qui semble bonne. Toutefois, un grand nombre de personnes à Genève souffrant de problèmes d'alcool ne fait pas appel au réseau. Et ce réseau souffre d'imperfections : les rôles entre acteurs mériteraient d'être clarifiés, ainsi qu'une répartition des ressources humaines qui ne semble pas toujours en proportion avec les demandes auxquelles un acteur du réseau doit faire face. Il semble exister également à Genève un manque relatif de lits de sevrage et d'appartements protégés pour la période de postcure.
Les problèmes et les besoins particuliers des personnes souffrant de dépendances mixtes à l'alcool et aux drogues illégales ne semblent pas trouver à l'heure actuelle de structure permettant une prise en charge optimale.
Il nous semble important de maintenir la diversité des intervenants du réseau et leur complémentarité dans la prise en charge des problèmes liés à l'alcool à Genève. Dans ce contexte, il pourrait être extrêmement positif de parvenir à étendre les compétences communes aux différents acteurs du réseau. Le DASS est actuellement en train de travailler dans ce sens.
Il serait également important de s'assurer que les différentes campagnes de prévention soient régulièrement évaluées sur la base des objectifs qu'elles se sont fixés; il est en effet capital de cibler correctement les groupes à risque, en plus de la population générale, de manière à réduire ces mêmes risques et ne pas avoir comme seul effet de diminuer la consommation d'alcool des buveurs modérés.
Pour ce qui est de l'accessibilité du réseau à l'ensemble de la population, des progrès ont déjà été réalisés, notamment avec la mise en place de l'unité mobile de la policlinique de médecine (en particulier pour la population sans domicile fixe,…), la réalisation du guide bleu sur le réseau d'alcoologie genevois (DASS), et la mise en service prochainement d'une ligne téléphonique (ALCOLIGNE) afin de mieux orienter les patients dans le réseau. Ce même réseau bénéficierait également d'une redéfinition des rôles entre différents acteurs de manière à ce que chacun puisse exercer ses compétences propres et spécifiques tout en étendant la collaboration avec d'autres lorsque le problème ne relève pas directement de ses attributions.
En ce qui concerne le parcours des patients dans le réseau de soins, il est d'une importance primordiale de parvenir à les conseiller quant à la prise en charge en tenant en compte de leur état de motivation face à leur problème d'alcool, de manière à ce qu'ils puissent bénéficier pleinement des structures existantes. Pour cela, une meilleure formation des médecins en alcoologie pourra faciliter leurs contacts avec les personnes souffrant de problèmes de dépendance et ainsi optimaliser la prise en charge.